Autoportrait-Montagne

(Après des années où seule la figure humaine structurait l'espace de ma peinture - période d'ancrage - autoportrait toujours).

Nous portons tous en nous les paysages de notre vie : la terre, le ciel, les arbres... Je viens de la campagne. J'en garde une présence au monde très physique.

L'aurtre jour, sur la digue qui surplombe l'autoroute : un vannier avec son fils venait couper de la luzerne pour les lapins. Le petit enfant se roulait dans la luzerne fraîche et me regardait venir, rire suspendu, comme un jeune animal.

Sentir l'herbe, la terre, humer l'air; cette présence physique : une très ancienne cohabitation.

J'en ai fait la série des Daphné : la femme y devenait paysage (été 1986). Puis vint l'hiver. Le "polyptique de la femme qui s'étire" montre des femmes qui s'étirent, respirent et baillent. Elles s'amplifient de ce désir d'air, prêtes à s'envoler. Je frôlais les anges. Au mois de juin suivant, dans les Vosges (paysage pluvieux aux détails noyés), je retrouvais cette force véhémente, courbes et contre-courbes, appel de tout l'être. En rentrant, je réalisais que je portais en moi ces paysages souverains. Je me sentais montagne. Je me suis mise à peindre.

Suzanne Obrecht - 1987

 

 


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